La taïga est le personnage principal de ce roman
Magnifique, magnétique, impitoyable, rude, très rude est la taïga. Le roman se permet avec bonheur de grands moments contemplatifs. Les hommes s’arrêtent parfois pour juste admirer la nature qui les entoure. Et j’aime quand le récit se permet ce genre de pause (vous ai-je parlé du film « Ghost in the Shell » de 1995 ?)
Mais où sommes-nous au fait ? Le récit se situe aux confins de la Russie non loin des terres Yakoutes. Une petite communauté vit de pêche, de chasse et du trafic des oeufs de poissons. Un véritable or rouge.
Mais quand sommes-nous ? C’est un récit contemporain.
Et les hommes ? Les hommes ne sont pas « magnifiques ». Certains sont braves, droits et justes. D’autres, beaucoup plus lâches et veules. Mais de toute façon pour vivre avec un peu de « confort » il faut un « métier » à côté. Personne n’est …
Magnifique, magnétique, impitoyable, rude, très rude est la taïga. Le roman se permet avec bonheur de grands moments contemplatifs. Les hommes s’arrêtent parfois pour juste admirer la nature qui les entoure. Et j’aime quand le récit se permet ce genre de pause (vous ai-je parlé du film « Ghost in the Shell » de 1995 ?)
Mais où sommes-nous au fait ? Le récit se situe aux confins de la Russie non loin des terres Yakoutes. Une petite communauté vit de pêche, de chasse et du trafic des oeufs de poissons. Un véritable or rouge.
Mais quand sommes-nous ? C’est un récit contemporain.
Et les hommes ? Les hommes ne sont pas « magnifiques ». Certains sont braves, droits et justes. D’autres, beaucoup plus lâches et veules. Mais de toute façon pour vivre avec un peu de « confort » il faut un « métier » à côté. Personne n’est blanc comme neige. Alors tout le monde contourne la loi sous l’approbation de la police qui ponctionne 20 % pour fermer les yeux.
Peut-être pensait-il que tout flic qui se respecte doit avoir son business. Ce n’était pas lui qui l’avait décidé, c’était la coutume.
Chacun vit sa vie et savoure la liberté sans pareille au milieu d’une nature sans limites.
La vie est rude et l’alcool coule à flots. Vraiment à flot. On boit de la Vodka ou des tors boyaux tout le temps, constamment.
Pas de repas sans Vodka.
Pas de rencontre sans Alcool.
On part en « expédition » dans la taïga sur un coup de tête après avoir beaucoup trop arrosé une discussion nocturne.
Il faut alors de la chance pour en revenir.
Un incident stupide entre un habitant et un policier nouveau venu va prendre des proportions dramatiques.
Le fragile équilibre de la communauté qui tenait surtout par un accord tacite « laisse-moi tranquille » vol en éclat.
C’est pour tous un révélateur : « Sommes-nous aussi libres que l’on veut bien le croire ? »
On peut se moquer du système, de Moscou… mais tout ça se rappelle avec force à tous.
Le récit est très bien dosé (à mon avis) entre moments de contemplation, tension, rencontres.
J’ai trouvé les personnages très intéressants : du plus rebelle au plus résigné, tous sont « vrais ».
Personne ne sonne faux.
Élargissons le cadre Le roman donne un éclairage bienvenu sur la perception du pouvoir et de la liberté en Russie
En Russie, le pouvoir avait toujours été une vache sacrée. Même ici, dans ces lieux reculés qui depuis la nuit des temps servaient de refuge contre les persécutions de toutes sortes et où le servage n’avait jamais pris, où des hommes plus qu’indépendants vivaient au sein d’une nature rude, les gens s’indignaient, non pas de la mauvaise structure du pouvoir lui-même, mais de l’injustice de ses actions. C’était stupide à n’y rien comprendre !
Les hommes boivent, mais leur liberté est un constant sujet de discussion
Tous les gars du coin se ressemblaient : ils voulaient une vie libre. Même au prix d’un pouvoir inique. Or un pouvoir inique corrompt même la liberté
On parle de changement de pouvoir en ce moment pour la Russie. Changement vraiment ?
Il savait pertinemment que de son vivant le pouvoir ne s’améliorerait pas en Russie. Le gouvernement actuel, la situation actuelle correspondaient précisément aux aspirations de l’absolue majorité des citoyens, à l’idée que ceux-ci se faisaient du bien-être.
Deux mondes qui s’ignorent
… Il comprenait bien qu’il n’existait rien de commun entre ceux qui regardaient le ciel depuis leurs bureaux moscovites, passaient leurs soirées au restaurant ou au théâtre, distribuaient les licences de pêche et de chasse, les autorisations à extraire l’or… et un Onc’ Sacha qui sillonnait la taïga sur son vieux tas de ferraille. Rien ne les unissait : ni Dieu, ni un tsar, ni même un guide bien-aimé.
Sur Moscou et le pouvoir
— Bon, chez nous, d’accord, c’est l’arbitraire, disons. Si tu es procureur, les autres n’ont qu’à se tenir à carreau. Mais tu prétends que c’est pareil à Moscou ? Ça veut dire que le pouvoir est pourri partout ? — À Moscou, c’est pire. Ici, malgré tout, subsistent quelques valeurs humaines. Là-bas, il n’y a que l’argent.
Points délicats ou qui peuvent l’être
On s’appelle par le prénom et le nom de famille, ou par le prénom seul, ou par un diminutif, ou par un surnom ! Et oui vous n’échapperez pas au moment « Mais de qui parle-t-il donc ? » Pas facile de suivre par moment Chasse : Pas question ici de chasse à la « galinette cendrée », mais chasse il y a.
Quelques citations pour se rendre compte du ton du livre
En avançant en âge – il avait quarante-trois ans –, il s’était mis à apprécier de plus en plus cette vie solitaire au cœur de la taïga. Il en était lui-même étonné : avec les années, bien des choses cessaient de l’intéresser et s’éloignaient en douceur, quittaient sa vie, mais cette attirance-là ne faisait que croître. Dans la forêt, il se sentait toujours bien. Mieux qu’ailleurs, avec qui que ce soit. La chanson préférée du Cuistot narrait l’histoire d’un gars qui cherchait l’amour et la liberté, mais qui était tombé sur une belle garce, une traîtresse. Il y avait là un désespoir très russe, un désespoir fou d’ivrogne – la trahison de cette garce symbolisait le désordre du monde –, authentique dans sa profondeur effrayante et mystérieuse. Cette histoire aurait pu être vulgaire, comme toutes les chansons de ce genre, mais elle ne l’était pas. Balabane possédait un savoir calme sur la vie : dans son interprétation, la fille était malheureuse, elle aussi, et c’était très important ; la douce voix du chanteur permettait à tous de s’élever au-dessus de ce qui aurait pu être une banale cuite. Il y avait dans le travail de ces hommes un sens immense, presque inaccessible à l’intellect, un sens qui émanait de cette taïga, de ces montagnes, contenu dans le travail lui-même, dans ce lourd labeur qu’ils accomplissaient sans rechigner en sachant que l’année suivante il leur faudrait recommencer